J’ai vécu le deuil de la vie que je pensais avoir. Après avoir appris que les muscles de mon corps se dégénéraient, j’ai vécu une dépression. Il manquait quelque chose dans ma vie. Mon esprit sportif, mon esprit compétitif avaient disparu. Il me manquait une raison d’être.
Chanceuse, j’ai trouvé le Centre d’intégration à la vie active (CIVA). J’ai commencé à jouer au basketball en fauteuil roulant. Je m’y suis fait des amis qui ont eux aussi un handicap. J’ai découvert qu’il y a aussi des jeunes qui ont comme moi des limitations motrices et qui vont à l’école. Il y a des adultes qui travaillent et conduisent malgré leur handicap. Il a des personnes qui sont mariées et ont des enfants. Ma perspective d’être une personne handicapée a commencé à changer.
Avec le sport est venue l’amitié. Et avec l’amitié sont venus des modèles qui m’ont montré comment c’est possible de vivre avec un handicap. Depuis de nombreuses années que je me tiens active en pratiquant divers sports. Ces deux dernières années, ma condition physique me limite de plus en plus. Je me suis alors tournée vers la boccia, un sport de stratégie qui est moins exigeant physiquement. Rapidement, j’ai fait ma place. En maitrisant les techniques et stratégies de jeu, je confronte maintenant des adversaires de haut calibre. Depuis un an, j’évolue à la boccia au niveau international. En septembre 2014, j’ai participé au Championnat du Monde de boccia, à Pékin, en Chine. Je me suis rendue en quart de finale. J’ai seulement 24 ans et je réussis maintenant ma vie en tant qu’athlète international de boccia et entraineur.
Je m’implique aussi bénévolement auprès de l’équipe junior de boccia que j’entraine chaque semaine. C’est ma façon de léguer aux plus jeunes ma passion et mes connaissances. J’espère les inspirer à foncer dans la vie. En plus, je donne des conférences dans les écoles afin d’inspirer d’autres jeunes à s’en sortir et dans les entreprises pour sensibiliser les milieux de travail à la réalité et au potentiel des personnes handicapées.
Pour moi, le sport est un moyen de surmonter des obstacles pour atteindre nos buts. Le sport m’a appris à être fière de mes habilités. Le sport m’a donné le courage d’être une meilleure personne. C’est vrai, je ne vivrai pas la vie que j’envisageais, mais je pense que c’est une vie incroyable.
Témoignage qu’Alison Levine a livré chez Bombardier, le 14 octobre 2014, alors qu’elle agissait comme porte-parole de la campagne de financement de Centraide du Grand-Montréal.
En 2009, nous étions une trentaine d’artistes du CIVA à prendre part aux ateliers du Musée en partage. Nous nous étions inspirés des œuvres du Musée pour créer entre autres un village avec des matériaux recyclés. Nous avions aussi présenté une centaine de toiles et de sculptures. C’était une consécration pour nous d’exposer dans une institution aussi renommée et qui présente de grands peintres.
Cinq ans plus tard, nous avons évolué en formant un regroupement, le CIVART+. Nous sommes huit artistes qui visent à peaufiner nos techniques et à nous faire connaître davantage sur la scène culturelle. Revenir participer aux ateliers du Musée en partage et exposer à nouveau devenait pour nous l’occasion de démontrer notre cheminement et notre potentiel. Notre défi consistait à peindre sur de plus grandes surfaces. C’était nouveau pour plusieurs d’entre nous. J’aime la liberté d’expression et la confiance que le Musée nous a accordée. L’art est pour moi une forme d’expression qui n’a pas de limites. Le plus plaisant est d’être considérés comme des artistes et non comme des personnes handicapées.
Aujourd’hui, je ne vois plus. Je ne vois plus, non plus, ma différence. Je viens d’une famille d’artistes, où l’art est omniprésent. Voilà plus de 20 ans que je peins. Je vois les couleurs dans ma tête et reproduit ce que j’imagine avec des matériaux texturés, ruban adhésif, crayons en relief et peinture. Mes doigts sont comme mes yeux. Je touche pour mieux voir et ainsi mes œuvres prennent forme, des paysages colorés, des animaux en mouvement… J’aime mélanger les couleurs, jouer avec les dégradés et la lumière, découvrir la vie dans mes toiles. Je voyage dans ma tête et dans mes pensées. Quel bonheur!.
Voilà près de vingt ans que Jocelyne Tremblay peint au CIVA, après avoir arrêté de travailler pour des raisons de santé. « J’aimais la peinture, mais il me manquait quelque chose », précise-t-elle. Les responsabilités et les défis la motivent. Il y a deux ans, elle participait avec le CIVA à une formation à Centraide pour prendre la parole en public. Pas prête à être porte-parole, elle passe donc son tour. Une autre occasion se présente, représenter le CIVA pour défendre les droits et intérêts des personnes handicapées. Elle relève aussitôt le défi. « Quand je travaillais, j’étais sur l’autoroute des connaissances. Une fois arrêtée, je suis tombée sur la voix de service », confie Jocelyne. Son estime d’elle avait chuté. En s’impliquant auprès de la table de concertation pour le transport adapté, elle a enfin repris la route. « Je me sens à nouveau utile et c’est vraiment l’fun. C’est comme les athlètes qui performent. C’est demandant et pas toujours facile. Mais c’est tellement motivant! Quand je rentre à la maison, je suis fière », ajoute-t-elle. Son but dans la vie? Continuer encore longtemps d’agir au nom des personnes handicapées.